samedi 1 décembre 2012

Une prétention de photographe...

...  vouloir saisir l'insaisissable.



L’air, l’eau, le sable… Trois éléments de densités différentes mais d’une extrême fluidité qui se marient avec harmonie dans une danse en perpétuel mouvement. 
Sans forme propre, ils s’adaptent en permanence et savent prendre la forme de tout contenant dans lequel ils sont placés.

La seule règle à laquelle ils sont soumis ici est la ligne d’horizon qui, elle-même, se courbe avec humilité sous l’effet de celle de la gravitation.


Fraser Island-Ql Australie (cliquer pour agrandir)


L’esprit humain ne sait comment se saisir de ce qui n’a pas de forme, alors il essaye de l’enfermer dans de multiples formes.
Il tente de l’encadrer dans une figure géométrique, comme le cadre rectangulaire du photographe ou du peintre ; cela lui donne l’illusion de le contrôler, de s’en accaparer, de le déplacer où bon lui semble.

Et il est malin, l’esprit humain : il lui appose le sceau du © qui veut dire droit de Copie.
Un C comme Croyance que cela m’appartient, un C  qui veut dire « C’est à moi »; un C comme Concept qui fait penser que je le Comprends (littéralement : que je prends avec moi), que je peux le saisir, que je peux le définir.
Un C comme Cliché qui fige le mouvement, qui « immortalise » l’instant en l’extrayant du vivant et du temps qui passe.

C’est un paradoxe de l’esprit : il ne peut immortaliser qu’en privant du vivant…

Qui plus est, ce © est entouré d’un cercle, figure close, clôture à ne pas franchir sous peine d’amende, car vous pénétrez dans « ma » propriété, dont le nom est indiqué juste après.

L’esprit, si volatil, peut-il posséder quoi que ce soit, sinon celui qui l’abrite ? Ne serait-ce pas justement cela, la possession ?  


Fraser Island-Ql Australie


L’esprit cherche un contenant qui permettrait de définir, de délimiter ce qui n’a pas de forme. Mais dé-limiter et dé-finir ne devraient-il pas justement signifier briser les limites, sortir de la cage du fini ?

Tant que l’on aborde d’un point de vue extérieur ce qui n’a pas de forme, l’expérience peut être angoissante ; on ne sait comment s’y relier, comment y pénétrer ; on ne sait pas comment s’y raccrocher ni quoi faire avec.

Il nous faut aller au-delà de l’esprit et des sens pour véritablement appréhender le Sans forme. Il nous faut faire « corps » avec lui, oublier notre propre forme, tout du moins celle que nous nous imaginons avoir, oublier nos fausses identités, pour se laisser porter et naviguer avec lui dans la même fluidité. Ainsi en est-il de la beauté, ainsi en est-il de l’amour.

C’est seulement alors que s’élève en nous une sensation de liberté, de vacuité joyeuse. Le Sans forme nous renvoie à un espace intérieur de paix, de sérénité, au-delà des concepts et des cadres pré-établis.


Fraser Island-Ql Australie